Une santé mentale positive, un déterminant de la persévérance scolaire!

Une santé mentale positive, un déterminant de la persévérance scolaire!

La Fondation Jeunes en Tête est heureuse de soutenir les Journées de la persévérance scolaire. Depuis 20 ans, elles sont un rendez-vous incontournable pour encourager et aider les jeunes à révéler tout leur potentiel et leur permettre ainsi de briller par leur détermination. 

Ces journées sont l’occasion pour nous de rappeler les liens indissociables qui unissent la santé mentale et la réussite éducative des ados, en plus de souligner le rôle crucial qu’occupe l’ensemble de l’équipe école dans la persévérance scolaire des élèves au quotidien. 

Décryptage d’une psychologue et d’une chercheuse, accompagné des conseils d’une enseignante au secondaire pour prévenir le décrochage scolaire et favoriser la persévérance chez nos jeunes. 

L’IMPACT DE LA DÉTRESSE PSYCHOLOGIQUE SUR LA PERSÉVÉRANCE 

Suzanne Vallières, psychologue et conférencière, mentionne: “Pour être persévérant, ça prend de la motivation, sans motivation il n’y a pas de persévérance. Ce qui fait que les jeunes vont perdre ou gagner de leur motivation ça peut parfois partir du contact humain qu’ils vont avoir avec leur enseignant·e et de l’investissement que le parent met dans sa réussite éducative”. 

La réussite éducative de nos ados se traduit notamment par leurs progrès sur le plan académique, mais elle dépend aussi de nombreux facteurs psychologiques et sociaux à ne pas négliger. Les conséquences d’un haut niveau de détresse, d’anxiété ou encore des enjeux en lien avec l’image corporelle sont des exemples d’éléments pouvant nuire à l’épanouissement des jeunes en milieu scolaire.  

“Les troubles d’anxiété qui surgissent chez les jeunes peuvent prendre diverses formes”, précise Marie-Hélène Véronneau, Ph.D., professeure à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), experte en santé mentale et réussite éducative. “Par exemple, un élève qui développe une phobie scolaire vit une peur intense face au contexte scolaire et cherchera à l’éviter à tout prix pour se soustraire à cette détresse. De la même manière, une phobie sociale peut se manifester par une crainte de faire une ou plusieurs actions en public (ex. parler, écrire, manger en public), donc la conséquence d’éviter l’école peut aussi se manifester. De manière plus générale, une élève qui serait anxieuse en réalisant certaines tâches scolaires (ex. un examen) ne peut pas performer à son plein potentiel, car la détresse émotive ou les pensées intrusives (ex. “je vais échouer”) prennent trop de place.” 

La psychologue Suzanne Vallières ajoute quepour apprendre, il est primordial d’être disponible sur le plan affectif. Sans nécessairement vivre de gros enjeux de santé mentale, un jeune qui vit des moments difficiles peut être affecté et ses résultats scolaires peuvent l’être aussi”. 

On parle ici autant d’une relation amoureuse tumultueuse que de conflits amicaux ou de relations familiales difficiles. Il faut se rappeler qu’à l’adolescence, tout ce qui relève des besoins affectifs occupe une place d’importance par rapport aux notions d’apprentissages.  

Un·e jeune très anxieux·se peut anticiper des disputes avec ses ami·e·s ou encore se sentir isolé·e. “Il ou elle risque donc d’être peu disposé·e à apprendre. Éventuellement, un·e jeune qui a peu de liens sociaux positifs ou qui éprouve un mal-être psychologique à l’école risque de voir ses notes ou sa fréquentation scolaire diminuer, voire être à risque de décrochagepoursuit la psychologue.  

LE RÔLE DES ENSEIGNANT·E·S POUR MOTIVER LES JEUNES 

Selon la Revue de psychoéducation1, les jeunes en dépression sont 10 fois plus sujets au décrochage scolaire.  

Experte en santé mentale et professeure à l’UQAM, Marie-Hélène spécifie que “lorsqu’une personne vit des symptômes dépressifs, il n’est pas rare de voir une perte d’intérêt pour ce qui était autrefois une activité d’intérêt. Si une élève se sentait auparavant motivée à venir à l’école à cause de sa passion pour les cours de science ou pour pratiquer une activité sportive en parascolaire, il est possible qu’un trouble dépressif cause une perte d’intérêt et nuise à son assiduité en classe.” 

Suzanne Vallières ajoute à son tour que “les jeunes en situation de décrochage scolaire vivent souvent beaucoup de détresse psychologique et du découragement en étant persuadé·e·s qu’ils ou elles n’y arriveront pas. Ces ados sont aussi souvent inquiet·e·s et ont peur d’exprimer leurs difficultés.’’ 

Marie-Hélène renchérit en rappelant au personnel enseignant: “souvent l’ado qui vit des difficultés à l’école vit un sentiment d’incompétence qui est néfaste pour sa motivation scolaire. Le fait de vivre des succès, que ce soit par de bonnes notes, ou par la valorisation de leur talent en art dramatique, en sport, ou à cause de leurs habiletés sociales et de leur leadeurship positif, peut redonner aux élèves un sentiment de compétence qui leur permet de se sentir à leur place à l’école.” 

Si un·e jeune ressent de la honte, tente de cacher ses difficultés et refuse d’aller chercher de l’aide, cela peut aussi causer de l‘isolement social. “Cet isolement empêche l’élève de satisfaire un autre besoin important, soit celui d’appartenir à une communauté (dans ce cas, la communauté scolaire). C’est important de briser l’isolement et de montrer à l’élève qu’il ou elle est vraiment important·e aux yeux de ses pairs et de ses enseignant·e·s malgré ses difficultés.” explique Marie-Hélène. 

Selon un sondage Léger2 dans le cadre des Journées de la persévérance scolaire, 57 % des jeunes citent un parent comme étant un facteur d’influence positive sur leur persévérance scolaire, 37 % un·e enseignant·e et 33 % leur cercle d’ami·e·s. Le rôle de l’équipe école et la cellule familiale est crucial et il ne faut pas sous-estimer l’impact de nos interventions et de notre discours sur la persévérance.  

Enseignante de français au secondaire, Gabrielle B. essaie de faire sa part auprès des jeunes: “Mes efforts pour encourager mes élèves et les mettre à l’aise à partager des signes de détresse passent par de petites interactions quotidiennes comme un regard, un sourire, un compliment.  C’est important pour moi qu’ils et elles sentent que je m’intéresse à ce qu’ils vivent et que je reste disponible.’’ 

Il est primordial de reconnaître les signes avant-coureurs de détresse chez un·e ado pour lui venir en aide adéquatement en amont, permettant ainsi d’éviter un potentiel désintérêt scolaire, en plus de proposer des solutions adaptées à sa réalité.  

👉 On vous invite d’ailleurs à consultez notre baromètre afin de vous permettre de situer un·e jeune dont les comportements ou propos vous inquiètent.  

 

Gabrielle ajoute: ‘’Lorsque les élèves me font des confidences assez grosses, je leur demande s’ils ou elles seraient à l’aise que j’en discute à la TES (technicien·ne d’éducation spécialisée) ou à m’accompagner dans un espace pour diminuer le stress avec des spécialistes que l’école a mis à leur disposition. Je tente de les rediriger rapidement vers les ressources qui leurs sont offertes tout en leur montrant que je suis là. Avoir une autre oreille plus qualifiée que moi ne peut que les aider!’’ 

Notre rôle en tant que filet de sécurité gravitant dans le quotidien des ados est de s’intéresser à leurs préoccupations et d’essayer d’ouvrir les discussions pour mieux comprendre ce qu’il se passe dans leurs têtes. Le fait de se sentir écoutés et compris incite plus facilement à se confier, permettant ainsi d’éviter l’accumulation d’émotions négatives ou de ruminations anxieuses. 

4 STRATÉGIES À METTRE EN PLACE EN CLASSE POUR SOUTENIR SES ÉLÈVES 

Parce que la persévérance et la réussite éducative sont des combats du quotidien, voici quelques gestes qui peuvent avoir un impact positif sur nos jeunes: 

 

1 – Adopter une posture ouverte et à l’écoute, et un discours bienveillant

Il est important de faire attention à nos verbalisations et généralisations auprès des jeunes.  

Voici quelques exemples de verbalisations à éviter, avec leurs formulations alternatives à privilégier : 

“Tu n’es jamais à tes affaires”, “Tu n’es jamais organisé·e”, “Tu ne vas jamais au bout des choses”, “Tu ne te relis jamais”, etc. 

“Je remarque que tu es moins motivé·e ces derniers temps”, “On dirait que c’est plus difficile pour toi”, “Qu’est-ce qu’on pourrait faire pour t’aider à t’organiser?”.  

Les ados sont capables seul·e·s d’entrer dans une spirale plus négative, ils ou elles ont besoin de se sentir en sécurité, de se faire valider dans leurs états inconfortables et finalement d’être accompagné avec des pistes de solutions tangibles afin d’affronter les défis et obstacles à surmonter. 

Valoriser les forces de l’élève est important: si un·e jeune a des difficultés en mathématiques, mais qu’il ou elle est capable d’écrire d’excellents textes, on peut lui offrir nos félicitations pour lui faire vivre un sentiment de compétence et peut-être l’encourager à les publier dans le journal étudiant pour valoriser cette réussite. Lorsqu’on se sent peu compétent à l’école, ça enlève le goût de faire des efforts, de participer, de sorte que sans aide et soutien additionnel pour surmonter les difficultés psychologiques, ces élèves peuvent être poussés vers le décrochage.explique Marie-Hélène. 

Tentez de rappeler aux jeunes les nombreuses sphères connexes qui composent leurs vies en précisant que l’épanouissement de soi et la réussite éducative se conjuguent avec de nombreux éléments et que la persévérance peut être alimentée par de multiples sources de motivation en dehors de la classe.  

Vous pouvez proposer à vos élèves de faire cet exercice pour les aider à identifier leurs forces personnelles:

👉 Télécharger la fiche pédago « Comprendre ses forces »

2 – Ouvrir la discussion sur la santé mentale 

Il est parfois difficile d’aborder le sujet de la détresse psychologique avec des élèves qui ont l’impression qu’on ne comprend pas ce qu’ils vivent.  

Enseignante au secondaire, Gabrielle B. explique comment elle crée le lien de confiance avec les jeunes: ‘’Je pose à mes élèves des questions autant sur ce qu’ils ou elles ont fait en fin de semaine que sur comment vont leurs vies. Je crois que c’est dans ces plus petits contacts que les jeunes se sentent à l’aise de partager des choses plus importantes et personnelles.’’ 

📝 Conseils pour ouvrir le dialogue avec un·e ado

3 – Encourager une bonne routine de sommeil

L’anxiété sociale, l’anxiété de performance, l’éco-anxiété, la peur du jugement des autres à travers les médias sociaux font partie de ce que Suzanne Vallières observe quotidiennement au sein de sa clinique lorsqu’elle rencontre des jeunes. Beaucoup de fatigue résulte de ces stresseurs que peuvent vivre les ados.  

La psychologue et conférencière soutient que “la fatigue a un impact direct sur la motivation et la persévérance. Une grande fatigue peu amener davantage de détresse ou d’anxiété. C’est important de rappeler l’importance d’une bonne routine de sommeil pour garder l’équilibre.” 

4 – Trouver la recette qui fonctionne

Autant à titre de parent que d’enseignant·e, nous pouvons par exemple solliciter et impliquer nos jeunes en leur demandant s’ils ou elles auraient des idées à apporter pour rendre leurs études plus stimulantes.  

Suzanne Vallières mentionne: “Il ne faut pas oublier qu’on enseigne à des jeunes qui sont constamment stimulé·e·s par des images qui défilent sur les médias sociaux et que ça impacte leur capacité de concentration. Leur demander ce qu’ils ou elles aimeraient et ce qui les motiveraient pour les mettre dans de bonnes conditions d’apprentissage et leur faire du bien est une excellente piste.”  

Marie-Hélène assure elle aussi qu’il est important d’impliquer le plus possible l’élève dans les décisions sur comment faire pour l’aider plutôt que de lui imposer des solutions. En effet, le fait de se sentir autonome, c’est-à-dire d’avoir l’impression que ses idées et opinions sont écoutées et prises en compte dans les décisions qui le concernent permet de satisfaire le besoin d’autonomie, qui est tout aussi important que les besoins de compétences et d’appartenance sociale.” 

Gabrielle, enseignant présentement le français en secondaire un et deux raconte: ‘’J’ai une élève qui était incapable de parler devant les autres. Pour un oral, je l’ai mise avec deux de ses amies en format « discussion » privée. Je voulais juste voir sa compréhension d’un roman. Elle était excellente et a eu A+. J’essaie de lui faire réaliser qu’elle s’exprime vraiment bien et que plus elle pratique, plus elle sera à l’aise. J’essaie de faire ma petite part pour réduire les problèmes de chaque élève et qu’ils saisissent leurs pertinences et leurs potentiels.’’ 

 

Adaptons-nous à la réalité de nos jeunes pour leur offrir de dont ils ont besoin pour s’accrocher et concrétiser leurs rêves. En équipe, faisons en sorte que chaque geste du quotidien compte pour encourager, écouter, soutenir et accompagner nos jeunes afin qu’ils puissent révéler leur potentiel et persévérer!


La santé mentale des ados occupe une place fondamentale dans leur persévérance scolaire au quotidien. Il y va d’une responsabilité collective de miser sur des stratégies de prévention audacieuses qui permettent aux jeunes de s’épanouir afin d’atteindre leur plein potentiel. En ce sens, la sensibilisation et l’éducation sur les facteurs qui permettent d’atteindre une santé mentale positive s’avèrent cruciales étant donné les défis complexes de notre époque. Antoine Beaudoin-Gentes, Directeur des programmes à la Fondation

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1Quiroga, C., Janosz M. et D. Marcotte. « Les sentiments dépressifs à l’adolescence : un facteur de risque différentiel du décrochage scolaire chez les filles et les garçons de milieu défavorisé ». Revue de psychoéducation, Volume 35, No 2, 2006. 

2Le Réseau québécois pour la réussite éducative. 2022. Sondage Léger pour le RQRE dans le cadre des Journées de la persévérance scolaire. https://bit.ly/3HaPosY 

 

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