Les jeunes font du doom... quoi ?

Les jeunes font du doom... quoi ?

D’après une entrevue avec Marie-Anne Sergerie, psychologue et autrice

Le doomscrolling ! Un mot qui ne tombe pas si aisément dans l’oreille, mais pour lequel les doigts de bien des ados ont attrapé la bougeotte. Quelle est cette nouvelle habitude préoccupante qui peut contribuer à rendre nos jeunes plus anxieux(ses) ? Comment y réagir en tant que parent ? Lumière sur ce phénomène avec Marie-Anne Sergerie, psychologue et experte en cyberdépendance.

Voici quelques questions quiz pour mieux comprendre le doomscrolling :

QUESTION 1 : Quelle est la traduction française de doomscrolling ?

A. Défilement morbide
B. Défilement de pertes
C. Défilement vers le bas
D. Le mot doomscrolling est accepté en anglais car il n’existe aucune traduction possible

 

RÉPONSE : A
« Le défilement morbide, c’est la traduction recommandée par l’Office de la langue française », nous explique la psychologue et autrice Marie-Anne Sergerie. Mais c’est plutôt l’anglicisme « scroller » que les jeunes ont tendance à utiliser à la place du verbe « défiler ».

QUESTION 2 : En quoi consiste le défilement morbide ?

A. À faire défiler sur leur tablette des vidéos prises à l’insu de camarades de classe.
B. À envoyer des vidéos de professeurs après les avoir fait fâcher.
C. À passer un temps excessif à faire défiler à répétition de l’information négative.
D. À envoyer par textos de longues listes de défis dangereux à relever.

RÉPONSE : C
« Le problème se situe lorsque le défilement se répète si souvent, qu’il s’apparente à une compulsion. Il faut se rappeler qu’à la base, tout comportement compulsif est adopté pour soulager un malaise préexistant. C’est donc une stratégie de défense pour arriver à s’engourdir, un peu comme le ferait la drogue. Mais c’est un soulagement de courte durée.

Dans le cas du doomscrolling, la compulsion s’ajoute au fait que les infos choisies sont déjà très négatives en soi. On pense par exemple à des mauvaises nouvelles de guerre ou de violence sur des sites d’actualité ou de faussetés sur les réseaux sociaux, ou encore des publications glorifiant la dépression et les pensées suicidaires. 

Et plus on en voit, plus on a l’impression que c’est vrai. Le cerveau prend en effet des raccourcis pour induire certaines croyances.  Alors oui, cela peut avoir un impact sur la santé mentale en augmentant la détresse et l’anxiété. »

C’est comme si la personne se retrouvait dans une grande spirale. – Marie-Anne Sergerie

QUESTION 3 – VRAI OU FAUX : Il y a un âge spécifique auquel ce trouble compulsif débute et on le situe à 11 ou 12 ans.

RÉPONSE : Faux

« Il n’y a pas de données précises à propos de l’âge. De toute façon, le plus important c’est d’identifier ce qui se passe, non pas en fonction d’un âge quelconque, mais plutôt à travers le comportement et la souffrance qui accompagne l’utilisateur(ice). Le principal indicateur chez un(e) jeune, c’est que son comportement devient incontrôlable lorsqu’il n’a plus accès à son téléphone cellulaire ou sa tablette. »

QUESTION 4 : Mais alors, comme parent, que faire si, lorsqu’on décide de confisquer le téléphone, une crise éclate ?

A. Lui redonner le téléphone.
B. Lui dire que s’il(elle) continue vous annulez tout bonnement le service auprès de la compagnie téléphonique.
C. Vous éloigner rapidement avec le téléphone pour éviter que ça dégénère.
D. Ne rien dire, lui remettre le téléphone mais faire annuler l’abonnement.

RÉPONSE : Hé bien, c’était une réponse piège puisqu’en fait rien de tout cela n’est recommandé.

« Bon, c’est sûr que si on redonne un téléphone suite à une crise, il y en aura certainement beaucoup d’autres à venir. Mais ici, la première chose à faire ce n’est pas de confisquer l’appareil, mais de comprendre que ce comportement vient de brandir un gros, un très gros drapeau rouge. Quelque chose ne va pas, et il est temps de communiquer avec votre ado pour savoir ce qui se passe vraiment. »

Que faire alors si vous observez tous ces signes chez votre jeune ? Quelle attitude adopter pour l’aider à lutter contre cette habitude nocive ? 🤔

« Il est important de privilégier le dialogue avec votre jeune », affirme la psychologue.

👉 Vous pouvez d’abord lui expliquer ce qu’est le doomscrolling et le sensibiliser aux risques que ce comportement peut avoir son bien-être. Puis lui poser des questions comme :

  • Qu’est-ce que tu aimes faire sur ton cell ?
  • Comment te sens-tu quand tu vas sur ces applications ?
  • Quand tu ne fais pas de doomscrolling, à quoi penses-tu ?
  • Qu’est-ce qui te fait vivre du stress ?
  • Combien de temps par jour passes-tu à faire cette activité ?
  • Comment vont tes relations avec les autres ?
  • Te sens-tu plus isolé(e) qu’avant ?

La question du temps passé à ce loisir est très importante. Vous pouvez en discuter avec votre ado pour établir ensemble des règles et appliquer une gestion saine de l’utilisation du téléphone.

« Le but ici n’est pas de le priver de son appareil, mais de convenir d’une stratégie d’utilisation responsable en évitant les excès. Par exemple, s’assurer que le souper pris en famille ne soit pas devant un écran. Faire également en sorte que tous(tes) rangent leur cellulaire pour la nuit. On convient alors d’un endroit pour les recharger qui se trouve loin des chambres. »

Le saviez-vous ? 3 ados sur 4 se branchent sur les réseaux sociaux dès leur réveil.

Ben, c’est sûr man que la première chose que je fais le matin c’est de prendre mon cell. Mais je suis pas dépendant. En tout cas, je pense pas là… ⸺ Casquette (surnom qu’il nous donne), 16 ans.

 

Ensuite, on tente de combler le vide en lui offrant de vivre d’autres expériences. Certains parents ont déjà convenu d’un pacte du style : tu passes autant d’heures de sport ou de bénévolat que tu vas en passer sur Internet. On peut montrer l’exemple lors d’une sortie familiale dans laquelle les cellulaires de tous resteront fermés. Ou bien de l’inscrire dans une activité semblant l’intéresser.

« Finalement, conclut l’experte, si on sait pimenter la vie des jeunes avec quelque chose de plus que seulement l’Internet, je n’ai pas l’impression qu’ils resteront fermé(e)s à ces expériences. Parce que ces petits cerveaux tout neufs et encore pleins de place… ils sont vraiment capables d’en prendre. »

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Cyberdépendance : quand l’usage des technologies devient un problème – Marie-Anne Sergerie

Devenu incontournable, Internet s’est immiscé dans notre quotidien et a modifié nos habitudes de vie au point d’avoir des impacts considérables. Pour certaines personnes, trouver un équilibre reste un défi ! À quel moment l’usage des nouvelles technologies devient-il un problème ? Comment comprendre l’apparition de la cyberdépendance ? De quelles façons se manifeste-t-elle ? Quels sont les différentstypes de cyberdépendance ? Comment la prévenir ? L’objectif principal de cet ouvrage est d’accompagner et d’aider les gens qui s’interrogent sur leur utilisation des technologies.

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